Login

L'assurance du fermier n'indemnise pas L'assurance du fermier n'indemnise pas

Une police d'assurance incendie souscrite par un fermier ne couvre les bâtiments que si une faute grave est démontrée à sa charge.

Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.

A la mort de son père, Jeannette prit la suite dans un bail. Les méthodes de travail et de gestion allaient changer. La nouvelle fermière n'hésita pas à emprunter pour moderniser son matériel : tout fut renouvelé et plus question de laisser ces appareils dans la cour. Le hangar à paille, devenu inutile, fut aménagé pour abriter les machines. Un tel capital justifiait une assurance et une police souscrite avec une compagnie proche de l'agriculture. Il était bien précisé que la garantie s'étendait à tous les dommages aux biens, donc tant au matériel qu'au hangar l'abritant.

Hangar incendié

Près de deux ans après la souscription du contrat, comme il se produit souvent en agriculture, un incendie d'origine inconnue s'est déclaré dans le hangar. Jeannette a eu le temps de dégager le tracteur, mais la bâtisse n'a pu être sauvée.

Un expert, mandaté par le propriétaire, est venu sur les lieux. Certes, comme la loi l'y oblige, le bailleur avait souscrit une assurance pour les bâtiments. Mais, conclu il y a des années, le contrat n'apportait pas une indemnité suffisante pour reconstruire. En conséquence, la somme provenant de la compagnie d'assurances fut versée à Jeannette, quitte pour elle à faire son affaire et à rétablir le hangar. La destruction ayant une cause fortuite, aucune obligation de reconstruire ne pouvait être mise à la charge du bailleur.

Or, la somme versée par la compagnie du propriétaire permettait tout juste de remonter une partie des murs. C'est là que Jeannette fit appel à l'assurance contractée pour ses dommages aux biens et d'en demander l'exécution pour une participation financière à la remise en état définitive du hangar. La position paraissait logique, les primes réglées pendant des années étaient fonction des dommages susceptibles de se produire aux biens. La cour d'appel, après expertise par un technicien du bâtiment, retenait qu'il n'y avait aucune faute de l'assurée dans l'origine du sinistre et que ses biens étaient endommagés. Elle a donc condamné la compagnie d'assurances à financer la reconstruction à l'identique du hangar pour ce qui n'était pas réglé par la compagnie du propriétaire.

Pas de faute grave

Les compagnies d'assurances s'inclinent rarement et un pourvoi fut formulé. Heureuse initiative, car les juges d'appel seront censurés. C'est à l'occasion de cette cassation que la cour suprême va poser des principes nécessaires pour l'interprétation de l'article L. 415-3 du code rural, en ce qui touche aux obligations du bailleur en matière d'assurance de l'incendie des bâtiments loués. En cas d'incendie d'un bâtiment faisant partie de la ferme louée, si le sinistre est d'origine inconnue, le propriétaire n'est pas tenu de reconstruire. Il doit simplement remettre au preneur l'indemnité perçue de sa compagnie dont il était seul tenu de régler les primes. En revanche, si l'incendie est dû à une faute grave du preneur, le propriétaire, et surtout son assureur subrogé, sont en mesure de faire condamner le preneur à supporter les conséquences financières du sinistre. C'est dire que le preneur n'a intérêt à souscrire une assurance pour les bâtiments loués que pour le cas où le feu se serait déclaré à la suite d'une faute grave de sa part.

Partant ce ces principes, il sera jugé que l'assureur de Jeannette n'est pas tenu de la dédommager, l'assurance n'étant destinée qu'à couvrir les conséquences d'un incendie provoqué par sa faute grave, spécialement lorsque le bailleur ayant été dédommagé totalement ou partiellement par son assureur, celui-ci se retournera contre le preneur, auteur de la faute grave.

Pratiquement, lorsque le preneur est amené à souscrire une police d'assurance incendie, celle-ci doit couvrir matériel, récoltes et stocks. Toutefois, elle ne concerne les bâtiments que si une faute grave est démontrée à la charge du fermier ou des gens de sa maison dans l'origine du sinistre. Dans l'espèce, Jeannette avait versé des primes d'assurance calculées pour partie sur un ouvrage non assuré.

[summary id = "10022"]

A découvrir également

Voir la version complète
Gérer mon consentement